🎶 Un mercredi d’avril entre deux mondes
Le mercredi 26 avril 2017, j’étais hospitalisée en médecine interne à l’hôpital Cochin. C’était un jour banal, rythmé par les prises de sang, les bilans, les va-et-vient des équipes de soin, et cette forme d’attente étrange qui s’installe lorsqu’on ne sait ni combien de temps on va rester, ni ce que l’on va découvrir sur son propre corps.
Et puis, quelque chose d’inattendu s’est produit.
Deux musiciens de l’association Tournesol – Artistes Ă l’hĂ´pital sont passĂ©s dans les chambres. Guitare, accordĂ©on… Ils ont commencĂ© Ă jouer du swing musette, mais très vite, les rythmes se sont mĂŞlĂ©s : un souffle brĂ©silien, une touche de tango argentin, une improvisation lĂ©gère, facile et enjouĂ©e… comme une agrĂ©able brise estivale.
J’étais subjuguée.
Il n’y avait plus de perfusion, plus de tension artĂ©rielle Ă surveiller, plus de diagnostics en suspens. Seulement ce moment de lĂ©gèretĂ© et d’insouciance, cette musique qui m’a littĂ©ralement transportĂ©e ailleurs, loin du lit d’hĂ´pital, loin de la maladie. Le swing entrait en vibration avec mon cĹ“ur fatiguĂ©, et chaque note rĂ©sonnait en moi comme une forme de rĂ©sistance douce Ă l’angoisse et Ă l’isolement.
🎵 L’art, un soin invisible mais puissant
Cet instant m’a marquée à jamais. Il m’a rappelé combien l’art – et en particulier la musique – peut agir comme un soin à part entière, non médicamenteux, mais profondément thérapeutique.
Lorsque l’on est malade, on se sent souvent réduit à son corps défaillant. La musique, elle, nous redonne une part de notre humanité, de notre capacité à ressentir, à vibrer, à s’émouvoir.
Ces musiciens n’étaient pas lĂ pour divertir. Ils Ă©taient lĂ pour crĂ©er un lien vivant, une parenthèse poĂ©tique dans un lieu dominĂ© par la science, la technique et la gravitĂ©. Et cela a tout changĂ©, pour moi, ce jour-lĂ . J’en ai pleurĂ© de joie…
🌿 Porter la beauté jusque dans la chambre du malade
Depuis ce moment, j’ai toujours gardé à l’esprit l’importance de défendre l’accès à la culture dans les établissements de santé. Non pas comme un luxe, mais comme une nécessité humaine.
Qu’il s’agisse de musique, de peinture, de poĂ©sie ou de théâtre, l’art a cette capacitĂ© rare : il soulage sans masquer, il accompagne sans nier, il Ă©veille sans fatiguer. Il nous relie au vivant quand tout autour semble figĂ© dans la douleur et l’irrĂ©versible.
Je n’ai jamais revu ces deux musiciens, mais leur passage, ce mercredi-là , continue de m’habiter. Comme une mémoire musicale de la résistance intérieure, discrète mais déterminée.
Je ne les remercierai jamais assez…