ChlordéconePollutionpréjudice d'anxiété

Par un arrêt très attendu, la Cour administrative de Paris s’est prononcée sur les fautes commises par l’État français dans le cadre de l’autorisation d’usage et de vente d’insecticides à base de chlordécone aux Antilles.

Alors que le Tribunal administratif de Paris reconnaissait le 22 juin 2022, la responsabilité de l’État pour les négligences fautives eu égard à la délivrance d’autorisations provisoires de vente de produits insecticides contenant du chlordécone par le ministre de l’Agriculture entre les années 1972 et 1986, ainsi que l’autorisation de vente de ces produits de 1990 à 1993, il ne faisait état d’aucun élément personnalisé concernant la situation des victimes. C’est dans ce contexte que les juges de première instance avaient rejeté le recours, à défaut, pour les requérants d’avoir prouvé leur préjudice d’anxiété lié à leur exposition à la chlordécone.

Dans ce contexte, la Cour administrative d’appel de Paris a été saisie par plus de 1 000 personnes, ayant toutes été exposées, en Martinique ou en Guadeloupe, à une pollution durable au chlordécone. 

Entre 1972 et 1993, l’utilisation d’une telle substance chimique présente dans des produits insecticides a été autorisée dans les plantations de bananes. C’est à ce titre que la Cour estime que l’État a commis une faute dès 1974, en autorisant provisoirement le renouvellement de vente de ladite substance. Dès lors, cette commercialisation sans études préalables sur la toxicité du produit, ni garantie de leur innocuité, constitue une faute. De surcroît, et malgré le progrès des connaissances concernant leur toxicité, l’État a persisté, de manière fautive, à homologuer ces pesticides ainsi qu’ à autoriser leur utilisation de façon dérogatoire entre 1990 et 1993.

En outre, les juges du fond estiment que l’État a également commis une faute simple en ne procédant pas à la collecte des stocks d’insecticides restants après leur interdiction.

Par ailleurs, eu égard à la connaissance tardive des risques sanitaires encourus par les populations exposées à la chlordécone, la Cour considère que leur créance n’est pas prescrite et que leurs préjudices peuvent donc faire l’objet d’une réparation.

La Cour administrative d’appel de Paris souligne que cette exposition est associée à un risque élevé de développer un cancer de la prostate ou une récidive de cette pathologie, ainsi qu’à un risque significatif d’impact sur le développement cognitif des fœtus et des nouveau-nés.

Par conséquent, la Cour, saisie d’éléments personnels et circonstanciés, condamne l’État à réparer le préjudice d’anxiété résultant de la prise de conscience du risque élevé de développer une pathologie grave, ainsi que, le cas échéant, un préjudice moral découlant des conséquences avérées de cette exposition.

Source : CAA Paris, 8e ch., 11 mars 2025, n°22PA03906

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