Les EHPAD se retrouvent très fréquemment confrontés aux difficultés de paiement de leurs résidents. Nombre d’entre eux initient une demande d’admission à l’aide sociale dès l’entrée dans les locaux. Mais lorsque cette démarche n’aboutit pas, la participation des obligés alimentaires est sollicitée. Il revient alors au Juge aux Affaires familiales de se prononcer pour fixer la quote-part de participation des obligés alimentaires en fonction de leurs ressources. Or, ce dernier ne peut se prononcer qu’à compter de sa saisine…
Ainsi, la période comprise entre le refus d’aide sociale et la saisine du Juge aux Affaires Familiales est rarement couverte. Et si le juge administratif est saisi parallèlement au Juge aux Affaires Familiales, comment s’opère la répartition des compétences ?
Dans un arrêt du 12 mai 2022, le Conseil d’Etat vient de confirmer les compétences traditionnelles des deux ordres de juridiction (n° 454403).
Les faits : A la suite de l’admission en EHPAD de Mme C., l’association chargée de sa tutelle a sollicité, en sa faveur le bénéfice de l’aide sociale à l’hébergement. Cette aide lui a été refusée compte tenu de ses ressources et de l’aide possible de ses obligés alimentaires. L’association a donc fait un recours contre la décision de refus et a sollicité l’octroi de l’aide à Mme C. pour la période ayant couru entre son entrée dans l’établissement et la saisine du juge aux affaires familiales, destiné à se prononcer sur le montant de la participation des obligés alimentaires.
La position du juge : Le Conseil d’Etat rappelle que le juge administratif est compétent pour fixer le montant de la participation laissée à la charge du bénéficiaire de l’aide sociale et/ou de ses obligés alimentaires. En revanche, il revient au juge judiciaire d’assigner aux obligés alimentaires le montant de leur contribution et la date d’exigibilité de leur participation à ces dépenses.
Quid en cas de juxtaposition des décisions : Dans le cas où la décision du Juge aux Affaires Familiales interviendrait avant celle du juge administratif, ce dernier serait lié par la décision ainsi rendue (CE 20 oct. 2017, n° 402111, Lebon). Pour la période antérieure à la date de la décision de l’autorité judiciaire, il reviendrait au juge administratif, en sa qualité de juge de plein contentieux, de s’assurer que la contribution postulée par le département n’a pas été ou ne sera pas versée spontanément par les obligés alimentaires.
En conclusion :
- Juge administratif : Fixation du montant que le bénéficiaire de l’aide sociale doit supporter s’il n’est pas pris en charge à 100%
- Juge judiciaire : Fixation du montant de la contribution de chacun des obligés alimentaires. Une fois qu’il est saisi, le juge administratif est lié par le montant restant à la charge du résident et assumé par ses obligés alimentaires.