Le 5 août 2015, des agents de l’office national de l’eau et des milieux aquatiques (ONEMA) ont constaté une pollution organique dans un cours d’eau, en aval immédiat d’une station d’épuration relevant de la commune. Des prélèvements effectués aussitôt ont révélé un taux élevé de sels ammoniacaux et nitrites toxiques pour les poissons et les invertébrés aquatiques.
Du fait du dysfonctionnement de sa station d’épuration, la commune a donc été poursuivie pour deux infractions au code de l’environnement :
- déversement de substance nuisible dans les eaux souterraines, superficielles ou de la mer ;
- rejet en eau douce ou pisciculture, par personne morale, de substance nuisible au poisson ou à sa valeur alimentaire.
Relaxée en première instance, le Ministère public a relevé appel et la commune a été déclarée coupable par la Cour d’appel des deux infractions susvisées. La commune s’est donc pourvue en cassation, l’occasion pour la Cour de revenir sur les principes de responsabilité pénale des personnes morales.
Pour condamner la commune, la Cour d’appel avait constaté la réunion des deux éléments constitutifs d’une infraction pénale :
- l’élément matériel : les agents de l’ONEMA ont constaté des taux de concentration de nitrites de 15 à 125 fois supérieurs à la normale alors que le prélèvement en amont ne révèle aucune anomalie ;
- l’élément moral : il est caractérisé à l’égard d’une personne morale, en l’absence de toute volonté expresse, dès lors qu’une imprudence ou une négligence dans l’exercice de ses attributions peut lui être imputée. En l’espèce, il était reproché à la commune de n’avoir pris aucune mesure concrète et suffisante pour réhabiliter la structure d’assainissement. La Cour a considéré qu’elle avait fait preuve de négligence
La chambre criminelle de la Cour de cassation considère que la Cour d’appel n’a pas été au bout de son raisonnement juridique.
En effet, aux termes de l’article 121-2 du Code pénal, les personnes morales, à l’exception de l’Etat, sont responsables pénalement des infractions commises, pour leur compte, par leurs organes ou représentants.
La Cour de cassation rappelle alors qu’il appartient au juge pénal de rechercher par quel organe ou représentant le délit reproché à la personne morale aurait été commis pour son compte. Ainsi, en déclarant la commune coupable d’infractions pénales sans identifier l’organe à l’origine de la faute, la Cour d’appel a commis une erreur de droit :
« sans rechercher par quel organe ou représentant le délit reproché à la personne morale aurait été commis pour son compte, la cour d’appel n’a pas justifié sa décision ».
L’élément moral suppose donc d’identifier précisément l’auteur du délit lorsqu’est en cause une personne morale.
Source : Cass. Crim. 16 avril 2019, n° 18.84-073