L’Office national d’indemnisation des accidents médicaux a le choix, pour récupérer les sommes versées à une victime, entre l’émission d’un titre exécutoire et la saisine du juge. Mais il ne peut pas cumuler les deux voies de droit
Dans le cadre contamination par le virus de l’hépatite C à la suite d’une transfusion sanguine, l’ONIAM se substitue aux structures de transfusion reprises par l’EFS pour indemniser la victime. Cependant, il dispose ensuite d’une action directe contre l’assureur de la structure de transfusion, sauf si la couverture assurantielle est épuisée ou si le délai de validité de sa couverture est expiré. Plusieurs questions étaient posées au Conseil d’Etat.
1° L’ONIAM peut-il émettre un titre exécutoire à l’encontre des assureurs ?
Le Conseil d’Etat rappelle qu’en vertu de l’article R. 1142-53 du code de la santé publique, l’ONIAM peut également émettre un titre exécutoire à l’encontre de l’assureur pour recouvrer sa créance dès lors qu’elle trouve son fondement dans les dispositions d’une loi, d’un règlement ou d’une décision de justice, ou dans les obligations contractuelles ou quasi-délictuelles du débiteur.
L’ONIAM dispose donc de deux voies de droit : l’action judiciaire ou l’émission d’un titre exécutoire.
Le Conseil d’Etat rappelle que ces deux voies ne sont pas cumulatives, mais exclusives l’une de l’autre. Ainsi, si l’ONIAM a émis un titre exécutoire il ne peut plus saisir le juge d’une requête tendant à la condamnation du débiteur au remboursement de l’indemnité versée à la victime. Il ne peut non plus saisir le juge concomitamment à l’émission du titre.
2° Comment les assureurs peuvent-ils contester le titre exécutoire ?
Naturellement, si l’ONIAM choisit l’émission d’un titre exécutoire, l’assureur peut le contester devant le juge compétent.
La compétence juridictionnelle dépend de la nature du contrat d’assurance qui fonde la créance. Il s’agira ainsi du juge judiciaire si le contrat d’assurance a la nature d’un contrat de droit privé, et du juge administratif si le contrat a la nature d’un contrat administratif.
S’il s’agit d’un contrat administratif, le tribunal territorialement compétent est celui dans le ressort duquel se trouve le lieu où s’est produit le fait générateur du dommage subi par la victime.
Le recours contre un titre exécutoire présente un caractère suspensif.
3° Quels sont les délais de prescription applicables ?
Tout dépend de la date d’introduction du litige.
Pour ceux en cours au 1er juin 2010, l’ONIAM agit en lieu et place de l’Etablissement français du sang, venant lui-même aux droits des anciens centres de transfusion sanguine. Son recours est donc soumis à la prescription biennale prévue par l’article L. 114-1 du code des assurances.
Pour les actions engagées postérieurement au 1er juin 2010, elles sont soumises « au délai de prescription applicable à l’action de la victime, à savoir le délai de dix ans prévu à l’article L. 1142-28 du code de la santé publique ».
4° Comment s’opère l’information des tiers-payeurs (assurance maladie) ?
Dans le cas général comme pour les transfusions, l’ONIAM doit informer les autres tiers payeurs lorsqu’il verse une indemnité à la victime comme lorsqu’il émet un titre exécutoire, afin de leur permettre de faire valoir leurs droits.
Mais, le Conseil d’Etat souligne que « il ne résulte ni de l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ni d’aucune autre disposition législative ou réglementaire que les tiers payeurs ayant servi des prestations à la victime en raison de l’accident devraient être appelés en la cause lorsque le débiteur saisit le juge administratif d’une opposition au titre exécutoire ».
Source : CE, avis, 9 mai 2019, n° 426365