Dans un arrêt du 22 octobre 2020, la Cour administrative d’appel de Bordeaux apporte deux éclairages pertinents, l’un sur la forme, l’autre sur le fond, portant sur le refus de délivrance d’un diplôme d’ostéopathie.
Dans cette affaire, une étudiante en ostéopathie au sein d’une école privée s’est vue refuser la délivrance de son diplôme à l’issue de sa formation. Elle a donc saisi le juge administratif pour obtenir la réformation de ce refus, la délivrance de ce diplôme et le versement de dommages et intérêts. En défense, l’école invoquait, sur la forme, l’incompétence du juge administratif, sur le fond, l’absence de validation des acquis nécessaires à la validation du diplôme.
1ère question : Quel juge saisir en cas de contestation ?
Dans l’affaire susvisé, l’établissement en cause soutenait, qu’en qualité de société par actions simplifiée de droit privé, il n’exerçait pas de mission de service public et ne disposait pas de prérogatives de puissance publique. En conséquence, ses décisions ne pouvaient être contestées que devant le juge judiciaire. Elle invoque donc sa forme juridique et l’absence de mission de service public.
La Cour administrative d’appel réfute cet argument et rappelle que ne peuvent user du titre d’ostéopathe que les « personnes titulaires d’un diplôme sanctionnant une formation spécifique à l’ostéopathie délivrée par un établissement de formation agréé par le ministre chargé de la santé dans des conditions fixées par décret ». Or, selon le code de l’éducation (art. L. 123-1), le service public de l’enseignement supérieur comprend l’ensemble des formations postsecondaires relevant des différents départements ministériels.
Elle en déduit que « Même en l’absence de telles prérogatives, une personne privée doit également être regardée, dans le silence de la loi, comme assurant une mission de service public lorsque, eu égard à l’intérêt général de son activité, aux conditions de sa création, de son organisation ou de son fonctionnement, aux obligations qui lui sont imposées ainsi qu’aux mesures prises pour vérifier que les objectifs qui lui sont assignés sont atteints, il apparaît que l’administration a entendu lui confier une telle mission ».
En l’espèce, l’établissement :
- Délivre une formation conduisant à la délivrance du diplôme nécessaire à l’obtention du titre d’ostéopathe, activité qui présente un intérêt général ;
- A été agréé par le ministre chargé de la santé pour cette mission ;
- Est tenu de respecter les conditions relatives à la formation des ostéopathes et à l’agrément des établissements de formation (contenu et durée des unités de formation, engagement dans une démarche d’évaluation de la qualité de l’enseignement dispensé, élaboration d’un projet pédagogique et la composition de l’équipe pédagogique) sous peine d’être suspendu ou retiré.
Par conséquent, la Cour administrative d’appel confirme que l’établissement, bien que privé, poursuit une mission de service public. Même s’il ne dispose pas de prérogatives de puissance publiques (c’est-à-dire de pouvoir identique à l’administration), il n’en demeure pas moins que ses décisions portant sur l’exécution de sa mission de service public relèvent de l’appréciation du juge administratif en cas de contestation.
2ème question : Qu’est-ce qui justifie un refus de délivrance ?
Le refus de délivrance ne peut reposer que sur l’absence de validation de chaque unité de formation, sous ses différents aspects : contrôle de connaissance, épreuve pratique en établissement de formation, et stages cliniques. Après rattrapage, si l’étudiant n’a pas obtenu la moyenne (moins de 10/20) à chaque unité sous ses différents aspects (théoriques, pratiques, stages), il ne peut valider pas son diplôme.
En aucun cas l’établissement ne peut s’adjoindre d’autres critères. En l’espèce, l’établissement disposait d’un règlement intérieur qui prévoyait une note obligatoire de 12/20 au clinicat. Le juge administratif censure cette disposition du règlement intérieur, qu’il n’entend pas opposer à l’étudiant, puisqu’elle n’est pas prévue par une disposition législative ou règlementaire.
L’étudiante ayant obtenu plus de 10/20 aux différentes unités, le juge administratif considère que le diplôme est validé.
Source : CAA Bordeaux, 22 oct. 2020, n° 18BX02898