Avec la crise COVID, les soignants sont soumis à une obligation de vaccination, refusée par certains d’entre eux. La « sanction » du défaut de vaccination est la suspension. Les juridictions ont été amenées à se prononcer sur de multiples situations. Faisons le point sur les dernières jurisprudences disponibles en la matière, rendues par le Conseil d’Etat.
L’obligation vaccinale n’est pas contraire aux principes fondamentaux : Ainsi que l’a jugé le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2015-458 QPC du 20 mars 2015, il est loisible au législateur de définir une politique de vaccination afin de protéger la santé individuelle et collective, ainsi que de modifier les dispositions relatives à cette politique de vaccination pour tenir compte de l’évolution des données scientifiques, médicales et épidémiologiques. Le droit à la protection de la santé garanti par le Préambule de la Constitution de 1946 n’impose pas de rechercher si l’objectif de protection de la santé que s’est assigné le législateur aurait pu être atteint par d’autres voies, dès lors que les modalités retenues par la loi ne sont pas manifestement inappropriées à l’objectif visé.
Source : CE, 23 sept. 2022, n° 462201
L’exercice des fonctions dans des locaux distincts des locaux de soins est sans incidence : Un premier agent suspendu travaillait dans la cantine du CHU. Un second sur un site distinct de celui des autres locaux de l’établissement de santé. Ils avaient contesté les décisions de suspension pour défaut de vaccination devant le juge des référés qui avait estimé que la circonstance qu’ils travaillaient à distance des locaux où sont prodigués les soins, était de nature à créer un doute sérieux quant à sa légalité. Le Centre hospitalier se pourvoit en cassation et le Conseil d’Etat procède à l’annulation des ordonnances : il résulte des dispositions de la loi que l’obligation vaccinale qu’elle prévoit s’impose « quel que soit l’emplacement des locaux » où travaille l’agent.
Source : CE, 2 mars 2022, n° 458237 et n° 459274
L’absence de contact avec les patients et les soignants est sans incidence : L’agent suspendu exerce les fonctions de contrôleur principal au sein d’une trésorerie hospitalière. Il a été suspendu pour défaut de vaccination, décision suspendu par le juge des référés au motif que, eu égard « à ses missions » et « à la configuration des locaux, l’intéressée n’était pas en contact avec des patients et n’entretenait pas d’interactions avec des professionnels de santé ». Le Conseil d’Etat considère que l’ordonnance est entachée d’une erreur de droit : l’obligation de vaccination instituée par la loi pour les personnes exerçant leur activité « dans un établissement de santé » s’impose que l’agent « ait ou non des activités de soins » et « soit ou non en contact avec des personnes hospitalisées ou des professionnels de santé.
Source : CE, 2 mars 2022, n° 459589 et 459790
L’agent en congé de maladie qui n’y satisfait pas peut être suspendu pendant ce congé : Un agent exerçant son activité dans un établissement de santé a été suspendu pour n’avoir pas satisfait à l’obligation vaccinale contre la covid-19, ce alors qu’il était en congé de maladie. S’il résulte bien de la loi du 5 août 2021 que l’employeur peut prendre une mesure de suspension à l’égard d’un agent qui ne satisfait pas à l’obligation vaccinale alors même qu’il est en congé de maladie, une telle mesure ne peut entrer en vigueur qu’à la date à laquelle prend fin le congé de maladie de l’agent. Il ne peut donc y avoir de décision de suspension pendant un arrêt maladie.
Source : CE, 2 mars 2022, n° 458353 ; CE, 11 mai 2022, n° 459011 ; CE, 23 sept. 2022, n° 4624400, 462201, 460010, 459987, 459974, 459125, 459123, 459122, 459121, 459120, 459119, 459016, 458699, 458695, 458693, 458690, 458686, 458681, 458666, 458517