Suite à la crise du covid 19, certaines obligations ont subsisté alors même que la situation était redevenue à la normale. C’est le cas de l’obligation vaccinale pour les soignants et personnels d’établissements de santé prévue par l’article 1er de la loi n° 2021-689 du 31 mai 2021 dans sa version modifiée par l’article 1er de la loi n° 2021-1040 du 5 août 2021.
Dans le cas où le personnel ne peut pas se prévaloir d’une contre-indication médicale justifiant l’absence de vaccination, ses fonctions sont suspendues jusqu’à ce qu’il apporte la preuve de cette vaccination.
Cette mesure est prise dans « l’intérêt de la santé publique, destinée à lutter contre la propagation de l’épidémie de covid-19 dans un objectif de maîtrise de la situation sanitaire » (TA Guadeloupe, 22 nov. 2022, n° 2200419).
Mais privés de leur droit à rémunération, la question s’est alors posée d’allouer à ces personnes le revenu de solidarité active (RSA). Le maintien d’un revenu minimal est corollaire de la dignité de tous, même non-vaccinés. Ces personnes ne peuvent rester sans revenus lors de leur suspension.
Par une instruction technique du 20 octobre 2021, la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) a précisé « les règles applicables aux situations de suspension du contrat de travail pour défaut de passe sanitaire tel que prévu par l’article 1er de la loi 5 août 2021 sur le calcul des droits au revenu de solidarité active » permettant ainsi l’allocation du RSA mais le Conseil départemental de la Haute Vienne s’y oppose.
L’article L 262-28 du code de l’action sociale et des familles dispose que le bénéficiaire du RSA est tenu de rechercher un emploi puisque le but de ce revenu est une meilleure insertion sociale et professionnelle. Or, « la circonstance que la situation dans laquelle se trouvent ces salariés ou agents publics résulterait d’un choix de leur part, sur lequel ils peuvent revenir à tout moment, et qu’ils ne recherchent pas un emploi dès lors qu’ils n’en sont pas privés, est sans incidence ». Les salariés ne peuvent pas prétendre chercher un emploi puisqu’ils ne sont pas en situation de perte d’emploi mais de suspension.
Par un arrêt du 22 décembre 2022, le Conseil d’Etat rejette la requête du Conseil départemental et confirme la légalité de l’instruction de la CNAF. Le Conseil d’Etat admet que la CNAF a pu valablement considérer que la suspension des fonctions emportait une interruption certaine de la perception des traitements et pouvait donc justifier le versement du RSA.
De ce fait, la fonction première du RSA qui est de permettre l’insertion sociale est reléguée au second plan car le RSA peut être versé même sans cette condition, ce qui importe c’est le besoin de l’allocataire.
Source : Arrêt du Conseil d’Etat du 22 décembre 2022 n° 462322