LES FAITS : Le centre d’études et de conservation des œufs et du sperme d’un établissement hospitalier informe à une personne physique qu’il sera mis fin à la conservation de ses gamètes, au motif que celui-ci a atteint l’âge de soixante ans, âge au-delà duquel l’intérêt de la conservation n’est plus justifié. Celui-ci a dans un premier temps saisi le juge des référés du tribunal administratif de Paris afin que soit suspendue l’exécution de la mesure mettant fin à la conservation de ses gamètes. Sa requête ayant été rejetée, le requérant se pourvoit en cassation devant le Conseil d’Etat. Par ailleurs, il présente à l’occasion de ce pourvoi une question prioritaire de constitutionnalité, estimant que les dispositions de l’article L2141-11 du Code de la santé publique portent atteinte à l’objectif à valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi, au principe de sécurité juridique et au droit de mener une vie familiale normale protégé par le dixième alinéa du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 en ce qu’elles ne déterminent pas elles-mêmes l’âge limite ne justifiant plus l’intérêt de la conservation des gamètes.
QUESTION : Les dispositions issues des articles L2141-2 et R2141-38 du Code de la santé publique, et plus particulièrement la condition d’âge, étaient conformes au droit au respect de la vie privée et familiale garanti par l’article 8 de la CESDH.
Pour le Conseil d’Etat, deux motifs justifient la condition d’âge posée par le législateur :
- Une dimension d’ordre biologique tenant à l’efficacité de l’AMP,
- Une dimension sociale tenant compte de l’intérêt de l’enfant à naître.
De plus, le principe même d’une condition d’âge pour recourir à une AMP relevant de la marge d’appréciation des Etats, les juges considèrent que la fixation de cet âge au soixantième anniversaire chez le membre du couple qui n’a pas vocation à porter l’enfant ne constitue pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale.
Le Conseil d’Etat va d’ailleurs plus loin en affirmant également que les dispositions de l’article L2141-11-1 du Code de la santé publique interdisant l’exportation à l’étranger de gamètes conservés en France en vue d’être utilisées à des fins prohibées sur le territoire national ne méconnaissent pas non plus l’article 8 de la convention, « pas plus que ne les méconnaissent les articles L. 2141-2, L. 2141-11 et L. 2141-11-1 du CSP combinés ». Autrement dit, le Conseil d’Etat ne se contente pas de simplement contrôler la conventionnalité des dispositions issues des articles L2141-2 et R2141-38 relatives à la condition d’âge à laquelle est subordonné le bénéfice d’une AMP, mais se prononce de façon globale sur plusieurs dispositions du Code de la santé publique ayant trait à la conservation et à l’utilisation des gamètes.
Dans ces conditions, le Conseil d’Etat valide l’ordonnance prise par le juge des référés du tribunal administratif prononçant l’exécution de la mesure mettant fin à la conservation des gamètes et rejette ainsi le pourvoi qui lui est soumis.
Source : CE, 15 juillet 2024, n°493840
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