Dans le domaine de la santé, les différends reposent souvent sur un même constat : la perte de confiance. Au fil du temps, cette perte de confiance s’envenime, se transformant en défiance vis-à-vis des actions de l’autre qui sont jugées calculées, voire dans un but de nuisance.
Ce constat, je l’observe quel que soit le domaine d’intervention : qu’il s’agisse du recours d’un patient contre son soignant ou l’établissement ou il a été pris en charge, d’un recours entre confrères ou toute discussion est devenue impossible, ou de celui d’un agent vis-à-vis de son administration de rattachement.
Très souvent, le recours au juge est la solution empruntée pour mettre fin au litige. Toutefois, cet outil ne m’apparaît pas toujours le plus adapté. Dans nombres de contentieux, je préconise dorénavant le recours à la médiation.
En effet, la médiation est juridiquement définie comme un « processus structuré, quelle qu’en soit la dénomination, par lequel deux ou plusieurs parties tentent de parvenir à un accord en vue de la résolution amiable de leurs différends, avec l’aide d’un tiers, le médiateur, choisi par elles ou désigné, avec leur accord, par la juridiction ». Or, pour tenter de parvenir à un accord, la médiation laisse les parties en présence s’exprimer.
Dès lors, la médiation conduit à rétablir le dialogue et vise à rétablir le lien de confiance entre les personnes.
Comment, dès lors, ne pas faire le rapprochement avec la sphère médicale puisque la prise en charge médicale repose sur un lien de confiance (lien de confiance qui unit le patient à son médecin, le patient et/ou le résident usager à son établissement sanitaire ou médico-social) ? On peut même aller plus loin en ses temps troublés, en soulignant que la médiation est adapté au rétablissement du lien de confiance du citoyen au système de santé, puisque la sécurité sociale, qui porte pour une grande partie le système de santé français, repose sur le principe de solidarité nationale, et donc plus largement sur le lien social.
Toutefois, pour que ce dispositif déploie sa puissance, encore faut-il l’entourer de garde-fous, qui constituent le cadre de la médiation :
- L’indépendance du médiateur : gage de confiance dans la neutralité de ce dernier, ce qui favorise une confiance dans le processus ;
- La compétence du médiateur : ne faudrait-il pas privilégier un tiers formé au mode de résolution plutôt qu’un expert de la matière pour limiter la défiance vers un système qui pourrait être considéré comme coopté ?
- L’information préalable des parties : il est indispensable d’obtenir le consentement libre et éclairé de la personne, gage de réussite du processus de médiation ; la médiation doit être le fait des parties et non pas imposée aux parties ;
- La confidentialité des échanges : La confidentialité assure l’aisance de la parole.
Or, aujourd’hui, nombre de médiation dans le domaine de la santé ne permettent pas aux parties de garantir les moyens susvisés. Par exemple, l’échec de certains dispositifs repose sur la proximité manifeste entre le médiateur et la structure de soins. Ainsi, on s’aperçoit aisément que les médiateurs qui interviennent pour le compte de la CDU participent davantage à renouer le dialogue rompu qu’à une réelle mission de médiation, et ce d’autant plus que leur saisine relève du directeur de l’établissement ou de l’auteur de la plainte.
Il est donc urgent de déployer la médiation, dans un cadre indépendant et aux mains des parties, car celle-ci ne pas être seulement vue comme un mode de règlement amiable des différends, mais comme un espace, en dehors de tout conflit, pour créer de nouveaux liens ou restaurer les liens distendus.
Donnons à la médiation sa fonction reconstructive.