Le secret médical constitue à la fois un droit fondamental pour le patient et une obligation légale pour le médecin. Institué par la loi Kouchner du 4 mars 2002, le secret médical couvre toute information portée à la connaissance du médecin, qu’elle lui soit directement confiée ou qu’il la constate dans l’exercice de ses fonctions.
Depuis l’arrêt Degraene de 1947, ce principe est reconnu comme étant de nature générale et absolue. Néanmoins, il existe certaines limites strictement encadrées par la loi.
L’article L.1110-4 du Code de la santé publique prévoit une exception autorisant la communication de certaines informations médicales aux ayants droits d’un patient décédé. Cette dérogation est strictement limitée à trois objectifs précis : connaître les causes du décès, défendre la mémoire du défunt et protéger les droits des ayants droits.
Le Conseil d’État a récemment confirmé cette dérogation dans une décision du 13 février 2024. En l’espèce, une patiente, souffrant de démence profonde et prise en charge au CHU de Caen, décède à la suite d’un examen radiologique. Son époux et sa fille demandent la communication de la radiographie réalisée le jour du décès, ainsi que du document relatant les médications administrées, afin de mieux comprendre les causes de son décès. Toutefois, le CHU ne répond à cette demande qu’après un délai de dix-huit mois.
Or, l’article R.1111-2 du Code de la santé publique prévoit que la communication du dossier médical doit intervenir dans un délai de huit jours suivant la demande, ou dans un délai de deux mois lorsque les informations remontent à plus de cinq ans.
Le dépassement substantiel de ce délai conduit donc le Conseil d’État à considérer qu’un manquement a été commis.
À la différence de la Cour administrative d’appel de Nantes, qui avait estimé que ce retard n’entraînait pas de préjudice, le Conseil d’État a considéré que le retard dans la communication du dossier médical, nécessaire à la compréhension des causes du décès de la patiente, constituait une faute, présumée entraîner un préjudice moral.
Ainsi, cette décision réaffirme le principe de transparence et de responsabilité envers les patients et leurs ayants-droits, qui demeurent les premiers détenteurs des informations médicales les concernant.
Source : Conseil d’État, 5ème et 6ème chambres réunies, 13 février 2024, n°460187
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