IndemnisationRéparation intégrale

Dans un arrêt n° 463770 du 13 février 2024, le Conseil d’État clarifie les modalités de réparation intégrale du préjudice corporel en rappelant deux principes fondamentaux : la libre disposition des indemnisations accordées aux victimes et la reconnaissance d’un préjudice professionnel certain, même en l’absence d’un parcours scolaire ou professionnel préétabli.

En l’espèce, un jeune homme de 16 ans, victime d’un accident de la circulation en 2000, a subi diverses interventions chirurgicales, dont une amputation partielle de la jambe droite. Une prise en charge tardive d’une infection polymicrobienne a conduit à une aggravation de son état, nécessitant treize nouvelles interventions chirurgicales. 

Le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a établi la responsabilité de l’AP-HP dans la prise en charge du patient, estimant que le retard intervenu avait entraîné une perte de chance de 70 % d’éviter l’amputation. En conséquence, l’AP-HP a été condamnée à indemniser la victime. 

Cependant, la cour administrative d’appel de Versailles a limité l’indemnisation de certains préjudices, ce qui a poussé la victime à introduire un pourvoi en cassation. 

Dans cette décision, le Conseil d’État censure la décision de la cour administrative d’appel de Versailles, en deux points. 

D’une part, en ce qu’elle subordonne l’indemnisation des frais d’appareillages futurs et des frais de santé futurs à la production de justificatifs. En effet, le Conseil d’État rappelle qu’une telle condition est contraire au principe de réparation intégrale qui garantit à la victime la libre disposition des fonds alloués, sans contrôle ultérieur sur leur utilisation. 

Et d’autre part, en ce qu’elle rejette la demande d’indemnisation de la perte de gains professionnels futurs au motif que l’intéressé ne se trouvait pas dans l’incapacité d’occuper un emploi. Il énonce que dès lors que la victime a été privée de toute possibilité d’accéder, dans des conditions normales, à une scolarité et à une carrière professionnelle, la perte de revenus futurs et les conséquences sur sa pension de retraite doivent être indemnisées comme un préjudice certain. 

Ainsi, par cette décision, le Conseil d’État renforce la protection des victimes en réaffirmant le principe de réparation intégrale. Il souligne que le principe de réparation intégrale exige une appréciation réaliste des préjudices, en considérant pleinement l’impact qu’ont eu les séquelles sur la vie des victimes. Cet arrêt s’inscrit dans une lignée jurisprudentielle qui a réitéré à plusieurs reprises, au cours de l’année 2024, l’application du principe de réparation intégrale.

Source : Conseil d’État, 5ème – 6ème chambres réunies, 13 février 2024, n°463770

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