Opéré en urgence dans le service de neurochirurgie du centre hospitalier universitaire de Limoges, un patient a vu son état se dégrader, notamment du fait d’une paralysie des membres inférieurs, après l’opération justifiant une nouvelle intervention et son hospitalisation pendant 13 mois dans un service de médecine physique et de réadaptation. Sa paraplégie persistant, il a saisi, ainsi que son épouse et ses deux enfants, le juge des référés du tribunal administratif de Limoges d’une demande d’expertise aux fins de réunir les éléments permettant de déterminer si une faute médicale était à l’origine de son état de santé, ce qui lui a été accordé.
Cependant, peu avant le début des opérations d’expertise, le patient a fait l’objet d’une nouvelle hospitalisation au service de réanimation du CHU, en raison d’une aggravation brutale de son état. Il est décédé, une vingtaine de jours après, à la suite d’un choc septique.
Sa veuve et ses enfants ont à nouveau saisi le tribunal administratif de Limoges d’une demande d’expertise, à laquelle il a été fait droit. Puis, ils ont saisi ce tribunal d’une demande de condamnation du CHU à leur verser une somme totale de 12 000 € en réparation du préjudice qu’ils estiment avoir subi à la suite d’un manquement par cet établissement à son obligation d’information à leur égard puisqu’ils n’avaient pas été informés de la gravité de l’état de santé du patient jusqu’à son décès.
Le secret médical s’oppose-t-il à la divulgation, auprès de la famille, d’éléments sur l’état de santé du patient ? L’article L. 1110-4 du code de la santé publique répond précisément à ce point :
« […] En cas de diagnostic ou de pronostic grave, le secret médical ne s’oppose pas à ce que la famille, les proches de la personne malade ou la personne de confiance définie à l’article L. 1111-6 reçoivent les informations nécessaires destinées à leur permettre d’apporter un soutien direct à celle-ci, sauf opposition de sa part. […] »
Ainsi, en cas de diagnostic ou de pronostic grave, le secret médical ne peut être opposé à la famille que si le patient a expressément indiqué son souhait de les maintenir dans l’ignorance. Dans le cas contraire, la famille doit recevoir information. Attention toutefois, cette règle ne vaut qu’en raison de la gravité de l’état de santé de la personne.
C’est en ce sens que s’est prononcée la Cour administrative d’appel de Bordeaux. Estimant que la condition de gravité était en l’espèce remplie, elle relève que le patient et son épouse ont sollicité à plusieurs reprises la communication de la totalité du dossier médical afin de comprendre l’origine de son état. De plus, le patient ne s’est jamais opposé à ce que ses proches fussent informés des évolutions de son état. Or, aucune information n’a été fournie à son épouse, malgré ses demandes. Il résulte, en outre, du rapport de l’expert, que sa veuve était encore dans l’ignorance totale, au jour des opérations d’expertise, « du dossier médical, des hypothèses diagnostiques formulées et de la pathologie finalement retenue ». Par conséquent, le défaut d’information est fautif et engage la responsabilité de l’établissement.
Source : CAA Bordeaux, 25 septembre 2018, n° 16BX03700