Quand bien même l’agent n’est pas titulaire de son poste mais de son grade, l’administration n’est pas totalement libre du choix de son affectation. Si des réserves ont été émises par la médecine préventive sur la compatibilité de l’état de santé de l’agent avec certaines missions relevant de son grade, l’administration doit en tenir compte, sauf à commettre une faute de service.
Auparavant conducteur de camion de collecte de déchets, l’agent est affecté sur des fonctions de collecte manuelle des ordures ménagères. Au jour de sa prise de fonction, il subit un accident en soulevant une poubelle.
Se fondant sur les recommandations du service de médecine préventive, il estime que l’administration ne pouvait l’affecter sur un poste de collecte manuelle des déchets et a donc commis une faute. Il demande l’indemnisation des préjudices ainsi subit.
En effet, quelques années auparavant, la fiche de visite médicale périodique établie par le médecin du service de médecine préventive le 15 juin 2011 concluait à la compatibilité entre le poste de M. B. et son état de santé sous réserve de l’absence de collecte manuelle des déchets. L’administration s’appuyait, pour sa part, sur une attestation de suivi établie postérieurement par un infirmier du service qui se bornait à mentionner comme seules restrictions le port de protections auditives et la vaccination contre certaines maladies.
Aux termes de son arrêt, le Conseil d’Etat rappelle qu’il « appartient aux autorités administratives, qui ont l’obligation de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et morale de leurs agents, d’assurer, sauf à commettre une faute de service, la bonne exécution des dispositions législatives et réglementaires qui ont cet objet ».
Il précise alors qu’il incombe à l’administration de prendre en compte « les propositions d’aménagements de poste de travail ou de conditions d’exercice des fonctions justifiés par l’âge, la résistance physique ou l’état de santé des agents, que les médecins du service de médecine préventive sont seuls habilités à émettre ».
En l’espèce, comme :
- Le médecin du service de médecine préventive n’est pas revenu sur ses constatations (incompatibilité de l’état de santé avec l’absence de collecte manuelle des déchets),
- L’infirmier du service de médecine préventive n’a pas compétence pour apprécier la compatibilité de l’état de santé de l’agent avec l’emploi,
L’administration ne pouvait se fonder sur la note infirmier pour estimer que les conclusions médicales précédemment prises étaient levées. Le Conseil d’Etat estime donc que l’administration a commis une faute en ne tenant pas compte de la réserve émise par la médecine préventive.
Source : CE, 12 mai 2022, n° 438121