En vertu de l’article L.3222 – 5-1 du Code de la santé publique, un registre doit être tenu dans chaque établissement de santé autorisé à fournir des soins psychiatriques sans consentement. Pour chaque mesure d’isolement ou de contention, ce registre mentionne le nom du psychiatre ayant décidé cette mesure, sa date et son heure, sa durée et le nom des professionnels de santé l’ayant surveillée. Annuellement, l’établissement établit un rapport rendant compte des pratiques d’admission en chambre d’isolement et de contention, la politique définie pour limiter le recours à ces pratiques et l’évaluation de sa mise en œuvre.
Dans sa décision du 8 février 2023, le Conseil d’État a eu l’occasion de rappeler les conditions encadrant la communication du registre de contention et d’isolement des patients au regard de l’article L.311-1 du Code des relations entre le public et l’administration (CRPA). Ce positionnement fait suite à des demandes formulées par l’association « commission des citoyens pour les droits de l’homme » (ci-après « l’association CCDH ») qui sollicitait des établissements de santé la communication d’une copie du registre de contention et d’isolement et du rapport annuel pour une même année, afin de rendre compte des pratiques de contention et d’isolement observées dans cet établissement. Cette demande a été récurrente sur plusieurs années et à l’encontre de nombreux établissements du territoire national.
Face aux refus des centres hospitaliers, l’association CCDH a saisi le juge administratif en vue d’obtenir une injonction de communiquer les documents susvisés.
Plusieurs juridictions de premier degré ont fait droit à la demande de l’association. Toutefois, certaines juridictions (comme le TA de Lille ou de Lyon par exemple) précisaient que la communication interviendrait « en occultant les éléments permettant d’identifier les patients et les personnels de santé, mais sans occultation de l’identifiant anonymisé du patient et des mentions relatives au début, à la fin et à la durée des mesures d’isolement et de contention ». En d’autres termes, les juridictions du premier degré admettaient que l’identifiant patient (IPP) puisse être laissé.
Par une décision rendue en date du 8 février 2023, le Conseil d’État apporte la méthodologie suivante :
- Ne doivent pas être occultées : « les dates, les heures et la durée de chaque mesure contention forcée ou d’isolement ».
- Doivent être occultées, en application des articles L. 311-6 et L. 311-7 du CRPA :
o Concernant les soignants : Les mentions « permettant d’identifier les soignants, afin d’éviter que la divulgation d’informations les concernant puisse leur porter préjudice. ».
o Concernant les patients : « les éléments permettant d’identifier les patients doivent être occultés préalablement à la communication du registre de contention et d’isolement, afin de ne pas porter atteinte au secret médical et à la protection de la vie privé ». Il précise que, compte tenu de la nature des informations en cause qui touchent la santé mentale des patients, et du nombre restreint de personnes pouvant faire l’objet d’une mesure de contention et d’isolement, facilitant ainsi leur identification, l’identifiant anonymisé des patients figurant dans les registres doit être regardé comme une information dont la communication est susceptible de porter atteinte à la protection de la vie privée et au secret médical.
Il s’agit d’une décision attendue par les établissements, car sécurisante pour le respect du droit des patients et conforme au principe de spécialité visé au RGPD.
Source : CE, 8 février 2023, n° 455887