- Assise définitive des hôtels hospitaliers par la LFSS pour 2021
Grâce à l’expérimentation des 41 établissements autorisés à proposer ces prestations d’hébergement temporaire non médicalisé, l’objectif double d’optimiser le parcours de soins du patient et de rationaliser l’organisation des soins a pu être conforté.
Ainsi, dans une volonté de pérenniser les hôtels hospitaliers, l’article 59 de la loi de de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2021 est venu insérer l’article L. 6111-1-6 dans le code de la santé publique, ainsi rédigé :
« Art. L. 6111-1-6.-Sans préjudice des dispositions de l’article L. 6111-1-5[1], les établissements de santé peuvent mettre en place un dispositif d’hébergement non médicalisé en amont ou en aval d’un séjour hospitalier ou d’une séance de soins pour des patients dont l’état de santé ne nécessite pas d’hébergement hospitalier pour leur prise en charge.
« L’établissement de santé peut déléguer la prestation à un tiers par voie de convention. »
Le § III de la loi précise :
« Les modalités d’application du présent article, notamment les conditions d’accès et les critères d’éligibilité des patients au dispositif mentionné à l’article L. 6111-1-6 du code de la santé publique, les conditions et les modalités de contribution de l’assurance maladie à son financement, en particulier pour sa mise en place, et les conditions de choix et de conventionnement des tiers qui peuvent se voir déléguer par les établissements la réalisation de la prestation d’hébergement, sont fixées par décret en Conseil d’Etat.
Un cahier des charges fixe les conditions d’accès à ce financement. Son contenu est établi par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale.
Le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation au plus tard le 31 décembre 2022. Ce rapport intègre une évaluation de la prise en charge des publics isolés, notamment dans le cadre de la chirurgie ambulatoire. »
A notre connaissance et d’après nos recherches, ces documents d’application de la loi n’ont pas encore été adoptés.
Or, l’article 1er du code civil dispose : « Les lois et, lorsqu’ils sont publiés au Journal officiel de la République française, les actes administratifs entrent en vigueur à la date qu’ils fixent ou, à défaut, le lendemain de leur publication. Toutefois, l’entrée en vigueur de celles de leurs dispositions dont l’exécution nécessite des mesures d’application est reportée à la date d’entrée en vigueur de ces mesures ».
Il faut donc en déduire que le dispositif de la LFSS nécessitant des mesures d’application, le nouveau dispositif n’est pas encore entré en vigueur. Il s’agit donc d’une étude prospective, sur la base du projet de décret en cours.
- Projet de décret en cours sur les modalités concrètes de la mise en place des hôtels hospitaliers
Le projet de décret a pour objectif de fixer les modalités d’application de la prestation d’hébergement lors de parcours de soins en établissement de santé, en application de l’article 59 de la loi n°2020-1576 du 14 décembre 2020 de financement de la sécurité sociale pour 2021, et notamment les conditions d’accès et les critères d’éligibilité des patients au dispositif, les conditions et les modalités de contribution de l’assurance maladie à son financement, en particulier pour sa mise en place, et les conditions de choix et de conventionnement des tiers qui peuvent se voir déléguer, par les établissements, la réalisation de la prestation d’hébergement.
- Formalités administratives (à confirmer avec l’adoption du décret à venir)
Le projet de décret prévoit que les établissements de santé proposant une prestation d’hébergement temporaire non médicalisé de patient doivent la déclarer, dans le mois précédent son démarrage, auprès du directeur général de l’agence régionale de santé territorialement compétente en indiquant le tiers délégataire de la prestation, le cas échéant.
Quant aux établissements de santé proposant déjà une prestation d’hébergement temporaire non médicalisé à la parution du décret, ils disposent d’un délai d’un mois après son entrée en vigueur pour la déclarer auprès du directeur général de l’agence régionale de santé territorialement compétente.
- Les conditions de séjour (à confirmer avec l’adoption du décret à venir)
Cette prestation ne saurait se substituer au retour au domicile du patient si celui-ci est compatible avec son état de santé.
La prestation d’hébergement temporaire ne peut excéder trois nuits consécutives sans acte ou prestation par l’établissement de santé prescripteur de l’hébergement et est programmée dans le cadre du parcours de soins du patient. La prestation d’hébergement temporaire attachée à un séjour hospitalier ne peut pas dépasser 21 nuits dans sa totalité.
Aucun soin ne doit être réalisé par l’établissement de santé dans ce lieu d’hébergement, exceptés ceux pouvant être réalisés en situation d’urgence notamment par la structure mobile d’urgence et de réanimation mentionnée à l’article R.6123-1 du code de la santé publique.
Les soins courants liés à une pathologie suivie par ailleurs, peuvent être réalisés en hébergement temporaire non médicalisé par des professionnels n’appartenant pas à l’établissement de santé prescripteur.
Le lieu d’hébergement peut être équipé d’outils de télésurveillance mis à disposition des patients.
La personne hébergée selon les modalités décrites au présent décret peut partager sa chambre avec un accompagnant ou, pour le patient mineur, avec deux accompagnants.
- Le lieu (à confirmer avec l’adoption du décret à venir)
L’hébergement temporaire non médicalisé se situe à proximité de l’établissement de santé prescripteur.
La prestation peut être réalisée par l’établissement de santé dans des locaux identifiés et distincts des espaces de soins et d’hospitalisation.
Elle peut également être réalisée en dehors de l’établissement de santé et être ainsi déléguée à un tiers par voie de contrat ou de convention.
- Le conditions contractuelles en cas de délégation (à confirmer avec l’adoption du décret à venir)
Le contrat doitnotamment préciser les modalités d’accès de la personne hébergée et de son ou ses éventuels accompagnants, leurs modalités d’hébergement et, le cas échéant, de restauration, les conditions de nettoyage et d’hygiène des locaux, ainsi que les règles de sécurité et de responsabilité en cas de non-respect des engagements réciproques.
Cette convention régit également les conditions tarifaires de la délégation et son régime fiscal.
Le tiers délégataire peut être un autre établissement de santé ou toute autre personne morale de droit public ou privé. Il est choisi par l’établissement de santé, le cas échéant, dans le respect des dispositions du code de la commande publique.
- Les conditions d’éligibilité (à confirmer avec l’adoption du décret à venir)
La prestation d’hébergement peut être proposée aux patients non éligibles à un retour à domicile ou à une hospitalisation à domicile et dont l’état de santé ne justifie pas ou plus une surveillance médicale ou paramédicale continue ni d’installation médicale technique lourde mais dont le maintien à proximité de l’établissement de santé peut être justifié par la combinaison de critères d’éloignement géographique, médicaux, sociaux et, ou, de récurrence des venues dans l’établissement.
Les critères d’éligibilité mentionnés sont précisés par les orientations publiées par la Haute Autorité de santé et relatives à l’hébergement non médicalisé de patients.
Les patients porteurs connus de pathogènes à risque de transmission directe ou indirecte via l’environnement ne sont pas éligibles à cette prestation.
- Le consentement du patient (à confirmer avec l’adoption du décret à venir)
Le patient auquel est proposé la prestation reçoit une information complète sur les caractéristiques de celle-ci.
Le consentement éclairé du patient est recueilli et tracé par tout moyen, y compris sous forme dématérialisée. Il est valable tant qu’il n’a pas été retiré par tout moyen.
Ce consentement porte sur :
1° le caractère temporaire et non médicalisé de l’hébergement et l’absence de soins et de surveillance médicale sur ce lieu, par l’établissement de santé ayant réalisé l’orientation vers la prestation d’hébergement ;
2° le fait que la personne hébergée n’est pas placée sous la responsabilité de l’établissement de santé, excepté pour tout évènement en rapport avec les soins qu’il lui aura délivré au sein de l’établissement de santé, lorsque la prestation est déléguée à un tiers ;
3° la contribution éventuellement demandée au patient par nuitée ;
4° Le respect du règlement intérieur de la structure d’hébergement.
- Cas de suspension (à confirmer avec l’adoption du décret à venir)
En vue de sauvegarder la santé et la sécurité des personnes hébergées, du public et du personnel, le directeur général de l’agence régionale de santé, lorsqu’il a connaissance de faits pouvant être regardés comme susceptibles de les compromettre, peut prononcer la suspension de la prestation d’hébergement temporaire non médicalisé, après avoir notifié son intention à l’établissement de santé qui en informera, le cas échéant, son prestataire, par tout moyen donnant date certaine à cette notification, et le ou les avoir invités à présenter des observations dans un délai de huit jours à compter de la réception de la notification.
Le directeur général de l’agence régionale de santé met fin à la suspension prévue au premier alinéa lorsqu’il dispose d’éléments nouveaux établissant que les faits qui l’avaient justifiée ont cessé.
Si à l’expiration d’un délai de 3 mois, l’établissement n’a pas pris les mesures permettant de mettre fin aux faits ayant causé la suspension, le directeur général de l’agence régionale de santé peut prononcer l’arrêt de la prestation d’hébergement temporaire non médicalisé après avoir informé par tout moyen donnant date certaine de son intention l’établissement de santé qui en informera, le cas échéant, son prestataire, et l’avoir ou les avoir invités à présenter des observations dans un délai de huit jours à compter de cette information d’intention.
- La prise en charge financière (à confirmer avec l’adoption du décret à venir)
Pour toute activité réalisée entre le 1 er janvier 2021 et le 31 décembre 2023, les établissements de santé bénéficient, sous conditions, d’un financement par l’assurance maladie destiné à accompagner la mise en place le dispositif d’hébergement temporaire non médicalisé.
Ce financement prend la forme d’un forfait à la nuitée réalisée dans le cadre de cet hébergement.
Les conditions d’accès à ce financement sont définies dans un cahier des charges (à venir). Le contenu du cahier des charges ainsi que le tarif de la nuitée sont fixés par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale (à venir).
[NB : Les établissements de santé qui ont conventionné avec les maisons d’accueil hospitalières, prévues à l’article L6328-1 du code de la santé publique, pour déployer une prestation d’hébergement temporaire non médicalisé de patient, ne peuvent pas bénéficier du financement au titre de ce dispositif].
Les organismes d’assurance maladie complémentaire peuvent participer au financement de la part de la prestation d’hébergement non médicalisée, qui ne fait pas l’objet d’une prise en charge par l’assurance maladie obligatoire, selon des modalités précisées par voie de convention passée entre l’établissement de santé, les prestataires tiers délégués le cas échéant, et les organismes complémentaires de santé concernés. Cette convention respecte les conditions posées par le cahier des charges relatif au financement par l’Assurance Maladie.
- Financement du dispositif
L’annexe 9 du PLFSS précise qu’une dotation inspirée des missions d’intérêt général et d’aides à la contractualisation (MIGAC) serait mise en place, allouée aux établissements en fonction du nombre de nuitées réalisées. Cette dotation serait temporaire et s’achèverait au bout de trois ans, le temps que l’établissement atteigne une autonomie dans le financement du dispositif. L’étude d’impact précise toutefois que ce modèle de financement est en cours de discussion entre les services du ministère de la santé, la CNAM et les fédérations hospitalières. Le coût du dispositif est estimé à 1,8 million d’euros pour la branche maladie en 2021.
III – Comment envisager la création d’un hôtel hospitalier ?
Le corpus juridique étant aujourd’hui incomplet, et le décret à venir n’éclairant pas sur les modalités pratiques de mise en œuvre du dispositif d’hébergement non médicalisé, il convient de se référer aux seuls documents techniques publiés dans le cadre de l’expérimentation pour apprécier les critères attendus d’un hôtel hospitalier.
A ce jour, il est possible de se référer aux documents suivants :
- Une circulaire de la CNAM du 4 mars 1993 relative aux « hôtels pour malades ». Antérieure à l’expérimentation, elle permet néanmoins d’apprécier les critères de financement par l’assurance maladie (qui n’ont pas évolué) ;
- L’arrêté du 2 février 2017 portant avis d’appel à projet et fixant la composition du dossier et les modalités de candidature pour intégrer la liste des établissements de santé retenus pour participer à l’expérimentation des hébergements temporaires non médicalisés de patients ;
- Les critères d’éligibilité des patients, tels que définis par la HAS ;
- Le formulaire d’évaluation annuelle établi dans le cadre de l’expérimentation.
La création d’un hôtel hospitalier poursuit trois objectifs :
- Répondre aux besoins réels de l’établissement : Il s’agit tant d’optimiser l’utilisation des lits disponibles au sein de l’établissement que de répondre aux besoins de la patientèle, au regard de sa situation sociale (isolement, handicap), que de sa situation médicale.
- S’inscrire dans le projet médical d’établissement, dans le respect de la cartographie sanitaire existante : L’objectif est d’améliorer l’efficacité de la filière de soins, sans augmenter sa capacité d’accueil (on est sur de l’optimisation), tout en respectant l’offre de soins locale, notamment en matière de HAD.
- Ne pas être un coût pour l’assurance maladie : Le coût de la prestation hôtelière doit être inférieur au tarif d’hébergement (hospitalisation complète) ou aux coûts de transport (hospitalisation ambulatoire).
CONCLUSION
Dans le nouveau dispositif :
- C’est l’établissement de santé qui procède à la déclaration du dispositif d’hébergement non médicalisé (« hôtel hospitalier ») auprès de l’ARS ;
- Le dispositif est conventionnel (entre l’établissement de santé et le prestataire). Tout est négocié avec l’établissement, en fonction de ses besoins.
Il faut donc connaître les besoins de l’établissement pour y répondre au mieux.
Attention : en cas d’offres concurrentes sur un territoire, le recours aux règles de la commande publique supposera que l’établissement procède à une mise en concurrence.
La convention doit prévoir la qualité de l’hébergement, les modalités de transports vers le lieu d’hébergement, un protocole de nettoyage et d’hygiène, les modalités de facturation des prestations et les modalités de transfert du patient en cas d’urgence.
[1] « Pour des motifs de sécurité, les établissements de santé publics et privés autorisés en application de l’article L. 6122-1 à faire fonctionner une unité de gynécologie obstétrique proposent aux femmes enceintes une prestation d’hébergement temporaire non médicalisé lorsque la situation de leur domicile implique une durée d’accès à une unité adaptée de gynécologie obstétrique supérieure à un seuil.
Un décret en Conseil d’Etat précise :
1° Les conditions d’accès à cette prestation, notamment la période au cours de laquelle elle est proposée aux femmes enceintes ;
2° Les modalités de son attribution ;
3° L’organisation de cette prestation, que l’établissement peut déléguer à un tiers par voie de convention ».