La Cour de cassation a jugé, le 21/10/2021, que la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) est en droit d’exiger le remboursement des indemnités perçues par un assuré lorsque celui-ci a effectué un voyage pendant son arrêt maladie.
La Cour nous rappelle ici combien la sanction est lourde pour le malade qui veut «changer d’air».
En l’espèce, un assuré s’était rendu en Algérie à cinq reprises alors qu’il était en arrêt maladie depuis près de deux ans et percevait des indemnités de l’Assurance maladie.
La Cour estime que toutes les indemnités depuis le début des versements peuvent êtres réclamées, sans se limiter aux indemnités correspondant aux seuls jours d’absence.
La Cour de cassation ajoute simplement, pour atténuer la sentence, que le juge peut modérer la demande de remboursement afin qu’elle soit proportionnée à la faute commise. En espérant que cette précision technique soit bien appliquée par la suite…
D’un côté, il est évident qu’une personne qui n’est pas en mesure de travailler ne doit pas «profiter du système». Et on sait qu’il y en a bien sûr. Et ceux là doivent en effet être sanctionnés.
D’un autre côté, quand il s’agit du malade qui a juste besoin de se reposer de la maladie de temps en temps, ou de retourner quelques jours dans sa famille éloignée…quelle injustice!
Pour rappel (au juge et à la sécurité sociale), être malade est une forme de travail à part entière qui fait justement qu’on ne peut plus exercer une activité professionnelle à côté.
Etre malade prend du temps et de l’énergie en soins et traitements : rendez-vous médicaux parfois pluri hebdomadaires, hospitalisations diverses (jour ou semaine), rééducation kiné/orthophonie etc…, renouvellement régulier des médicaments qui peuvent être nombreux, bien faire attention (stress quotidien) à la répartition des doses et des molécules matin/midi/soir (parfois même un pilulier XXL ne suffit pas), traitements chronophages (aérosols par exemple), se préparer des repas équilibrés pour conserver un apport nutritionnel favorable, marcher quotidiennement pour que le corps ne se démuscle pas trop, se reposer même quand on n’en a pas envie mais parce que cela est indispensable (et fait partie du job!)…
Tout cela ne relève pas des loisirs. C’est épuisant physiquement et psychologiquement.
Comment un tel rythme est-il possible à suivre sans changer d’air de temps en temps?
Aller un week-end à la campagne ne signifie pas que l’on est soudainement apte à travailler. Et cela permet au malade de s’aérer physiquement et mentalement, ce qui fait aussi partie du traitement dont tous doivent pouvoir bénéficier, que les maladies soient psychiques ou organiques.
Partir en week-end en couple pour tenter de maintenir celui-ci déjà affaibli par la maladie au quotidien, c’est aussi une forme de travail auquel le malade doit se plier s’il ne veut pas finir seul au monde avec comme seule perspective…le suicide!
D’une manière générale, auparavant, la Cour avait déjà jugé qu’en cas d’arrêt pour maladie, toute activité non expressément autorisée par le médecin était interdite, même une séance de remise en forme par exemple. La logique est ici facile et il suffit que le médecin cautionne l’activité en ce qu’elle est utile au maintien ou au rétablissement du patient.
Ensuite, la jurisprudence a toujours insisté sur le fait que l’ayant droit a pour obligation de se soumettre à des contrôles de présence à l’adresse du domicile qu’il a au préalable renseignée, et il doit respecter les horaires de sortie autorisés par le médecin qui a délivré l’arrêt de travail. Ok, soit. Mais là ça se corse… Etre là du lundi au vendredi à l’année, bien sûr…c’est le rythme «de routine» du malade (sauf RV médicaux, courses alimentaires…). Mais pourquoi le malade n’aurait-il pas droit à ses 5 semaines de congés pour partir en vacances de la maladie?
A cet égard, la règle la plus contraignante est celle qui interdit au malade percevant des indemnités de quitter la zone de compétence de sa caisse d’assurance maladie sans autorisation préalable de celle-ci. C’est ainsi qu’un malade avait dû rembourser ce qu’il avait reçu parce qu’il était parti passer une semaine dans le département voisin. Et ce alors même qu’il en avait informé sa caisse!
Les CPAM n’arrivent toujours pas, deux ans après la naissance du Covid, à contacter les professionnels de santé pour finaliser l’octroi des aides de la 1ère vague Covid… comment envisager qu’elles puissent donner leur feu vert en temps et en heure, comme un employeur envers son salarié, aux malades qui «poseraient leurs dates de congés».
Le principe est louable bien sûr, mais c’est alors aux CPAM d’instaurer un système efficace qui permette aux malades de prendre dans les faits des vacances «de la maladie».
Tout salarié a droit chaque année à des congés payés quel que soit son contrat de travail (CDI, CDD ou interim), son temps de travail (à temps plein ou temps partiel) et son ancienneté. Priver l’affilié malade de ce même droit est une rupture du principe d’égalité devant les charges publiques. En somme, rien d’autre qu’une violation d’un droit constitutionnel….!