Le Tribunal administratif de Paris, par un arrêt en date du 16 juin 2023, a franchi une étape majeure dans la reconnaissance du lien entre la pollution de l’air et certaines pathologies infantiles. Ce dernier a, en effet, jugé que la survenue d’otites moyennes chez un enfant durant les quatre premières années de sa vie pouvait être imputée aux dépassements réguliers des pics de pollution. En conséquence, l’État a été condamné à indemniser les demandeurs pour manquement à son obligation de respect des normes nationales et européennes relatives à la qualité de l’air.
Cette décision s’inscrit dans la continuité d’une autre affaire jugée le même jour, concernant des problèmes respiratoires (TA Paris, 16 juin 2023, n°20-19.94).
Dans les deux cas concernant le fondement de la responsabilité, le juge administratif a rappelé que la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), par un arrêt du 22 décembre 2022 (CJUE, Grande Chambre, C-61/21), avait estimé que les dispositions européennes relatives à la qualité de l’air n’offraient pas aux particuliers un droit individuel à réparation en cas de violation de ces normes par un État membre. Toutefois, le juge a souligné que cette décision “n’excluait pas la possibilité d’engager la responsabilité de l’État dans des conditions moins restrictives sur le fondement du droit interne”.
Le Tribunal administratif de Paris a ainsi fondé sa décision sur le droit interne français, permettant aux particuliers de demander une réparation. Cette reconnaissance du droit à indemnisation repose sur des connaissances scientifiques établies, démontrant le lien de causalité entre la pollution de l’air et les otites moyennes infantiles.
Concernant la causalité, le juge a retenu ce lien en raison de deux éléments clés :
- En premier lieu, il convient de vérifier, au regard des connaissances scientifiques actuelles, si un lien entre les pics de pollution et leurs conséquences dommageables est plausible.
- Ensuite, les symptômes doivent être apparus dans un délai considéré comme « normal » après l’exposition aux pics de pollution, en fonction du type d’affection.
- Enfin, il ne doit pas ressortir du dossier d’autres causes pouvant expliquer l’apparition des symptômes en dehors des pics de pollution.
Cette décision constitue une avancée significative en matière de responsabilité environnementale de l’État et de protection de la santé publique. Elle ouvre la voie à de nouvelles actions en justice pour les victimes de pathologies liées à la pollution, consolidant ainsi le principe selon lequel la carence de l’État dans la gestion de la qualité de l’air peut engager sa responsabilité et donner droit à réparation.
Source : TA Paris, 16 juin 2023, n°2019924
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