Depuis le 1er/01/2020, les modalités de prescription et de prise en charge des médicaments du répertoire des génériques ont évolué, suite à l’arrêté du 12/11/2019 précisant, en application de l’article L. 5125-23 du code de la santé publique, les situations médicales dans lesquelles peut être exclue la substitution à la spécialité prescrite d’une spécialité du même groupe générique.
Les apports de l’arrêté
Avant cet arrêté le patient devait déjà se voir délivrer le générique sauf si le médecin prescripteur avait mis sur l’ordonnance la mention du médicament original (ou « princeps ») comme « non substituable ». Néanmoins, le médecin prescripteur était totalement libre dans l’évaluation des situations médicales imposant de ne pas remplacer le médicament par son générique.
Désormais, le médecin prescripteur ne peut mentionner « non substituable » sur l’ordonnance -et donc exclure la délivrance du générique- que dans 3 cas limitativement énumérés :
1° Prescription de médicaments à marge thérapeutique étroite pour assurer la stabilité de la dispensation, lorsque les patients sont effectivement stabilisés avec un médicament, et à l’exclusion des phases d’adaptation du traitement (ex : médicaments visant à éviter le rejet d’une greffe, ou Lévothyrox). Le prescripteur devra inscrire la mention « non substituable (MTE) ».
La liste des principes actifs rentrant dans la composition des médicaments pouvant relever de cette situation est elle-même très restreinte :
– lamotrigine,
– pregabaline,
– zonisomide
– lévétiracétam,
– topiramate,
– valproate de sodium,
– lévothyroxine,
– mycophénolate mofétil,
– buprénorphine.
2° Prescription chez l’enfant de moins de 6 ans, lorsqu’aucun médicament générique n’a une forme galénique adaptée et que le médicament de référence disponible permet cette administration. Cette situation renvoie par exemple à un médicament original disponible sous forme de sirop avec pipette mais qui, en générique, n’existerait qu’en comprimés. Le prescripteur devra inscrire la mention « non substituable (EFG) ».
3° Prescription pour un patient présentant une contre-indication formelle et démontrée à un excipient à effet notoire présent dans tous les médicaments génériques disponibles, lorsque le médicament de référence correspondant ne comporte pas cet excipient. Il s’agit de la mention « non substituable (CIF) ».
Cependant, dans tous les cas, le patient demeure
libre de choisir le médicament original mais sera alors remboursé sur la base
du générique et ne bénéficiera pas du tiers payant.
Critique de l’arrêté
- Cet arrêté altère le respect du secret médical en prévoyant un codage qui paraît trop explicite au regard de la situation médicale du patient (pour la 1ère hypothèse surtout).
- Et si l’on comprend l’objectif légitime des pouvoirs publics, les conditions d’accès au princeps semblent trop strictes. Par exemple, si l’on prend la 3ème hypothèse, le texte exige « une contre-indication formelle et démontrée à un excipient à effet notoire présent dans tous les médicaments génériques ». Or, dans le cas des personnes allergiques à certains éléments, on sait qu’il existe des allergies croisées connues à d’autres éléments qui pourraient être des excipients. Respecter l’arrêté à la lettre impliquerait donc, afin de « démontrer » l’allergie suspectée, de faire ingérer au patient le médicament contenant l’excipient et au final de lui faire prendre un risque éventuellement vital en cas de choc anaphylactique… La même question se pose pour certaines personnes souffrant de maladies rares, telle que la mastocytose ou le syndrome d’activation mastocytaire, pour lesquelles on sait aujourd’hui que les malades sont, d’une manière générale, réactifs à certains médicaments et surtout à leurs excipients. Ces patients là auront donc le choix entre prendre un risque pour leur vie et se faire rembourser intégralement, ou alors choisir de ne pas prendre de risque en prenant le médicament de marque mais qu’ils paieront alors quasi-intégralement.
Ainsi, cet arrêté illustre parfaitement que dans certains cas, créer des règles trop précises pour le plus grand nombre finit par défavoriser certains petits groupes qui sont alors sacrifiés. Et on s’éloigne alors cruellement de l’égalité devant les charges publiques….