Cumuler une activité de masseur-kinésithérapeute et ostéopathe ne conduit pas à couvrir l’ensemble des actes réalisés sous le statut d’ostéopathe. C’est ce que nous rappelle récemment le Conseil d’État dans un Arrêt du 9 août 2023.
LES FAITS :
Un masseur kinésithérapeute, également titulaire du titre d’ostéopathe a reçu en consultation une patiente afin de traiter ses difficultés à concevoir, par des manipulations ostéopathiques visant à améliorer la mobilité de l’utérus.
Après les manipulations externes et une séance d’hypnose, il a réalisé sur sa patiente un geste de toucher vaginal à l’origine de douleurs qui l’ont conduite à demander à ce qu’il y mette fin immédiatement.
Se plaignant de brûlures dans le vagin, d’une incapacité prolongée à avoir des rapports sexuels et d’un traumatisme psychologique, la patiente a saisi le Conseil Départemental des Pays de la Loire de l’Ordre des Masseurs-Kinésithérapeutes, qui a transmis la plainte à la Chambre Disciplinaire de Première Instance, en s’associant à cette plainte.
LA PROCÉDURE :
La Chambre Disciplinaire de Première Instance a infligé aux masseur-kinésithérapeute la sanction de l’avertissement. Le Conseil Départemental de l’Ordre des Masseurs-Kinésithérapeutes a relevé appel de cette décision et la Chambre Disciplinaire Nationale a infligé la sanction de l’interdiction temporaire d’exercer la profession de masseur-kinésithérapeute pendant une durée d’un mois assorti du sursis.
Le Conseil National de l’Ordre des Masseurs-kinésithérapeutes qui s’est joint au dossier, s’est pourvu en cassation contre cette décision de sanction.
LA QUESTION DE DROIT :
Tout l’intérêt de cet arrêt est de savoir si un masseur-kinésithérapeute qui dispose également du titre d’ostéopathe peut, dans le cadre de ses fonctions, réaliser un toucher pelvien.
LA RÉPONSE DU CONSEIL D’ETAT :
En premier lieu, le Conseil d’État rappelle que les ostéopathes ne peuvent pas réaliser des touchers pelviens. En effet, ils ne sont pas professionnels de santé et le Décret N° 2007 – 435 du 25 mars 2007 interdit expressément cette pratique.
Les masseurs-kinésithérapeutes sont, quant à eux autorisés à réaliser des touchers pelviens (vaginal et rectal), à visée bilan diagnostique et thérapeutique dans le cadre de la prise en charge, sur prescription médicale, de la rééducation périneo-sphinctérienne dans les domaines urologique, gynécologique et proctologique.
L’arrêt commenté précise qu’un masseur-kinésithérapeutes ne peut pratiquer de toucher pelvien que sur prescription médicale.
LA SOLUTION :
Par conséquent, le Conseil d’État pose très logiquement qu’il « résulte des articles 75 de la Loi N° 2002 – 303 du 4 mars 2002 et 1er et 3 du Décret N° 2007 – 435 du 25 mars 2007 qui interdisent au praticien justifiant d’un titre d’ostéopathe d’effectuer des touchers pelviens, qu’un masseur-kinésithérapeute, qui justifie du titre d’ostéopathe, n’ est autorisé à pratiquer un geste de toucher pelvien que lorsqu’il est habilité à réaliser cet acte dans l’exercice de sa profession de masseur-kinésithérapeute, et dans le respect des dispositions relatives à son exercice professionnel à ce titre ».
EN BREF :
Ainsi, la seule circonstance que ce geste soit pratiqué par un professionnel disposant des deux titres ne suffit pas à justifier sa réalisation hors du cadre légal applicable à la masso-kinésithérapie.
En d’autres termes, ce n’est pas parce que l’ostéopathe est également masseur- kinésithérapeute qui peut pratiquer un toucher pelvien s’il ne dispose pas d’une prescription médicale.
Attention aux professionnels qui, s’ils ne respectent pas ces principes, seront susceptibles de poursuites tant pénales que disciplinaires.
Source : Conseil d’État, 4 août 2023, N° 46 72 13.