Saisi d’un recours contre une décision d’inscription au tableau de l’ordre des infirmiers, le conseil régional doit vérifier que l’intéressé remplit les conditions relatives notamment à la moralité, à la compétence et à l’absence d’état pathologique incompatible avec la profession.
M. A., infirmier, a sollicité son inscription au tableau de l’ordre. Le conseil interdépartemental de l’Eure et de la Seine-Maritime de l’ordre des infirmiers a demandé au conseil régional de Haute-Normandie de diligenter une expertise en raison d’un doute sur l’existence d’une infirmité ou d’un état pathologique incompatible avec l’exercice de la profession (article R. 4112-2, III du code de la santé publique). Au regard des conclusions d’expertise, le conseil départemental a refusé l’inscription de l’intéressé par une décision du 9 novembre 2016, au motif qu’il présentait un état pathologique incompatible avec l’exercice de la profession d’infirmier. M. A. a alors saisi le conseil régional, qui a rejeté tacitement le recours, puis le conseil national qui a annulé le refus d’inscription et inscrit le demandeur au tableau de l’ordre, estimant que son état n’était pas incompatible avec l’exercice de la profession . Le conseil interdépartemental a sollicité l’annulation de la décision d’inscription.
Après avoir rappelé que la décision prise par le conseil départemental sur une demande d’inscription au tableau peut faire l’objet d’un recours devant le conseil régional, dont la décision peut elle-même faire l’objet d’un recours devant le conseil national, le Conseil d’Etat souligne néanmoins que saisi d’un tel recours, le conseil régional ou le conseil national ne peut prononcer une inscription au tableau qu’après avoir vérifié que l’intéressé remplit l’ensemble des conditions relatives à la moralité et à l’indépendance professionnelle, à la compétence et à l’absence d’infirmité ou d’état pathologique incompatible avec l’exercice de la profession, prévues au I de l’article R. 4112-2. En cas de doute, il doit diligenter une expertise. Devant le conseil régional ou national, elle n’est nécessaire que si le conseil estime que celle réalisée précédemment est insuffisante.
Le Conseil d’Etat impose de vérifier l’ensemble des conditions précitées avant de procéder à une inscription au tableau de l’ordre des infirmiers.
En l’espèce, le conseil national, s’écartant de l’appréciation des experts, a
estimé que l’intéressé ne présentait pas un état pathologique incompatible avec
la profession d’infirmier. Ce faisant, le conseil national a procédé à
l’inscription de l’intéressé au tableau sans
vérifier expressément qu’il remplit la condition relative à la compétence
professionnelle, autre condition requise pour l’inscription.
En réponse à l’argumentation tirée de ce que l’exercice de l’intéressé en milieu hospitalier avait donné lieu, à plusieurs reprises, à de graves reproches de ses supérieurs puis à une procédure de licenciement, le conseil national s’est borné à indiquer, d’une part, que le conseil départemental n’avait pas relevé d’insuffisance professionnelle et, d’autre part, qu’il n’appartenait qu’au conseil départemental de prendre l’initiative d’une expertise sur ce point.
Toutefois, le conseil départemental n’a pas eu à se prononcer sur la condition relative à la compétence, dès lors qu’il avait retenu un état pathologique incompatible avec l’exercice de la profession. C’est pourquoi, le Conseil d’Etat rappelle que « Dans ces conditions, le conseil départemental est fondé à soutenir que le conseil national, en ne vérifiant pas la compétence professionnelle de l’intéressé avant de l’inscrire au tableau, a commis une erreur de droit relative à l’étendue de sa propre compétence ».
Source : CE, 20 décembre 2018, n° 413576